Méthode syllabique, méthode globale, méthode mixte, où classer la méthode LES ALPHAS ?

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Méthode syllabique, méthode globale, méthode mixte, ces termes définissent les trois grandes méthodes d’apprentissage de la lecture. Depuis 2018, l’Éducation nationale a statué en faveur de la méthode syllabique. En quoi consiste exactement ces méthodes ? Quelles sont leur efficacité et leur utilisation en classe ? Y a-t-il une meilleure méthode pour apprendre à lire ? Et dans quelle catégorie classer la méthode LES ALPHAS ? Récréalire fait le point.

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Pourquoi l’apprentissage de la lecture suscite-t-il le débat ?

Le programme PISA, piloté par l’OCDE, compare tous les trois ans les différents systèmes éducatifs mondiaux dans les 36 pays membres, et aboutit à un classement selon trois compétences : la lecture, les mathématiques et les sciences. Elle constitue un véritable benchmark pour les ministères de l’Éducation. Le dernier classement de 2018 place la France en 24e position pour la lecture, sur les 79 pays concernés, avec une perte de cinq places par rapport aux résultats de 2015. Force est de constater que si les résultats sont stables, la France peine à améliorer ses résultats et stagne dans le milieu du peloton.

Selon un article publié sur le site education.gouv au sujet de l’enquête PISA : « L’enquête note que les pays qui ont le plus progressé ont agi à la fois sur l’organisation de leur système scolaire et sur les méthodes pédagogiques. Les méthodes explicites, systématiques et dont les résultats sont mesurés par des évaluations sont les leviers essentiels des progrès des systèmes éducatifs. » Ces résultats ont conforté le ministère de l’Éducation nationale à faire de la lecture son cheval de bataille, visant à combler les difficultés de l’apprentissage de la lecture, en s’attachant notamment à l’analyse et au choix des méthodes de lecture.


Classement complet consultable sur le site de l’OCDE : https://www.oecd.org/pisa/

Résultats français étude PISA : https://www.education.gouv.fr/enquete-pisa-2018-stabilite-des-resultats-des-eleves-francais-de-15-ans-7589

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Le choix d’une méthode

On oppose habituellement deux types de méthodes d’apprentissage de la lecture : l’une va de l’élément simple, la lettre, vers le texte (méthode alphabétique) ; l’autre va du texte vers la lettre (méthode mixte et méthode globale). Du point de vue scientifique, on parle davantage de méthodes phoniques (méthodes syllabiques) et de méthodes non phoniques (méthodes globales).

La méthode syllabique

La méthode syllabique fait partie des méthodes phoniques, et est également appelée « méthode synthétique ». Connue depuis la Grèce antique, elle privilégie l’entrée dans la lecture par le signe, qu’il soit écrit (graphème) ou oral (phonème). Il s’agit d’abord pour l’apprenant·e d’établir une relation entre le son et sa représentation graphique. Une fois les lettres identifiées, elles sont associées entre elles pour former des syllabes, puis des mots. C’est la célébrissime méthode du « B-A, BA ». Cette méthode connaît son heure de gloire au XIXe siècle.

La méthode globale

La méthode globale fait son apparition au début du XXe siècle, en s’inspirant des mouvements de l’Éducation nouvelle, qui prennent en compte les centres d’intérêt de l’enfant. Son fondateur, Ovide Decroly, pédagogue belge, l’a mise au point pour aider les enfants en difficulté dans la lecture. Selon lui, il est nécessaire de capter l’attention de l’enfant pour que celui-ci retienne un mot, en rapport avec ses goûts et ses centres d’intérêt. Dans les années 1970, en France, une autre méthode globale, dite « méthode de lecture idéovisuelle », voit le jour. Son créateur, J. Foucambert, prône l’abandon systématique de la combinatoire. La méthode est basée sur une mémoire visuelle et auditive. Ainsi, les enfants apprennent à reconnaître les mots dans leur globalité, sans apprendre à reconnaître les lettres, les syllabes.

Ayant le vent en poupe dans les années 1970, elle est abandonnée dans les années 1980.

La méthode mixte

La réalité est plus nuancée sur le terrain. Les enseignants combinent en grande majorité les deux méthodes. La méthode syllabique est utilisée pour déchiffrer les mots qui se prononcent normalement et la méthode globale, pour les mots dont la prononciation ne correspond pas à leur orthographe.

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Où classer la méthode LES ALPHAS ?

La méthode LES ALPHAS a comme point commun avec la méthode syllabique d’être une méthode phonique. La première est une méthode phonique analytique, tandis que la seconde est une méthode phonique synthétique.

• La méthode phonique analytique : méthode LES ALPHAS. Elle prend pour point de départ les sons de la langue, les phonèmes, que l’on met en relation avec les graphèmes (différentes façons d’écrire ce son), puis que l’on repère dans les mots et enfin dans les phrases.

• La méthode phonique synthétique : méthode syllabique. Il s’agit de convertir les lettres (graphèmes) en sons (phonèmes), et ensuite d’associer les sons pour former des mots reconnaissables.

La méthode LES ALPHAS aborde donc la lecture par le phonème, auquel elle fait correspondre les graphèmes, et s’appuie sur les constats scientifiques de ces vingt dernières années, qui ont démontré la compétence incontournable qu’est la « conscience phonémique » qu’il convient d’acquérir pour entrer dans la lecture.

La méthode LES ALPHAS tient compte de cette recommandation, et s’appuie sur le bagage que possède l’enfant, c’est-à-dire le langage oral. Il est nécessaire que l’enfant comprenne la structure du mot, et qu’il ait découvert la connaissance des phonèmes. À partir du moment où l’enfant est capable d’identifier les phonèmes et qu’il a compris le principe alphabétique, on va pouvoir avoir une entrée graphémique.

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Que dit la recherche sur l’efficacité des méthodes ?

En d’autres termes, quelles pratiques pédagogiques sont efficaces en classe ? Pour répondre à cette question, différentes études ont été menées, principalement dans les pays anglophones. Une étude du National Reading Panel, menée en 1998-1999, qui prend en compte 38 enquêtes, affirme que l’enseignement par la méthode syllabique est plus efficace du point de vue du déchiffrage mais aussi de la compréhension, qualité habituellement attribuée à la méthode globale, en particulier dans les milieux défavorisés.

En lecture, qu’est-ce qui marche ? Extrait d’une parution de 2006 dans Le Monde de l’éducation : « Du moment que le déchiffrage est enseigné systématiquement, il importe peu que l’approche soit plutôt analytique (du mot ou de la syllabe vers le phonème) ou synthétique (du phonème vers la syllabe et le mot). Dans l'état actuel des connaissances, les approches analytiques (partant du mot et de la syllabe vers le phonème) semblent aussi efficaces que les approches synthétiques. » 

Il semble donc que le vieux débat sur la simple opposition globale-syllabique soit dépassé. Il faut aujourd’hui se focaliser sur les méthodes qui développent les compétences préalables que doit acquérir l’enfant pour entrer correctement dans la lecture, à savoir la compréhension du langage oral, une solide conscience phonologique et la motricité fine.